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Santander, nostalgie d'une Belle Époque royale

          Partout, dans le petit port espagnol qui accueille les skippers de la Solitaire jusqu'à dimanche, flotte le souvenir du roi Alfonso XIII. L'esprit Belle Époque berce les allées et venues des passants sur la promenade maritime du Paseo Pereda...

Se balader à Santander, c'est plonger dans un autre siècle, celui du roi espagnol Alfonso XIII, grand-père de l'actuel Juan Carlos, qui a fait de la ville son lieu de villégiature préféré. De 1913 à 1930, la famille royale et sa cour se sont déplacées chaque été à Santander pour fuir la chaleur étouffante de Madrid. Au cours de ces dix-sept années, la ville s'est modelée au goût du couple royal, empreint du style Belle Époque. Près d'un siècle plus tard, elle conserve ce charme raffiné, présent dans l'urbanisme comme dans les manières de ses habitants, qui défendent avec fierté ce passé monarchique.

À l'exception de la cathédrale gothique, érigée au XVIe siècle sur les restes de l'église Cristo (XIIe), Santander ne conserve aucun monument historique. En 1941, un incendie dramatique, provoqué par un court-circuit dans le port, a ravagé le centre-ville. Les vieilles bâtisses en bois, la plupart des églises et des palais, sont partis en fumée, comme l'ensemble des archives conservées dans la bibliothèque. Ce drame n'a fait aucune victime, mais a modifié à jamais la physionomie de la ville, brûlée à 70%. Seul le Paseo de la Pereda, artère principale de la ville où s'alignent les maisons de style français avec bow-windows en bois, est miraculeusement épargné. Bâtis au début du XXe siècle pour la famille royale, les bâtiments édifiés le long de la baie sont aujourd'hui le seul legs historique de la ville.

Un style pittoresque éclectique

C'est le Palais de la Magdalena, situé sur les hauteurs d'une colline à l'entrée de la baie, qui est à l'origine du passé royal de la ville. En 1908, la mairie entreprend la construction d'un château, qu'elle destine au couple royal. Dessiné par deux architectes du pays, Javier Gonzalez et Gonzalo Bringas Vega, le projet est financé, par souscription, par tous les habitants. Le résultat est surprenant. Mélange de style français, anglais et d'architecture typique de la Cantabrique, la bâtisse, siège aujourd'hui de l'université d'été internationale Menendez Pelayo, appartient au style dit «pittoresque éclectique». Contenant plusieurs salons et une vaste salle de bal, le palais domine toute la baie et fait face à la mer, tout en étant protégé des vents par une pinède touffue. En l'offrant le 4 août 1913 à Leurs Majestés, la mairie réalise alors une formidable opération «marketing». Jusqu'à la proclamation de la Seconde République espagnole, en 1931, le roi fait de ce palais sa nouvelle résidence d'été. Mieux encore, il suscite un mouvement de mode, qui fait venir toute l'aristocratie espagnole de l'époque. Chaque jour, la presse se fait l'écho de la «villégiature royale», en racontant par le menu les vacances d'Alfonso XIII, qui organise ses conseils de ministres dans le nouveau palais, entre deux bains de mer.

Une grandeur passée préservée

Pour accueillir la venue de ces estivants madrilènes, la ville se transforme et modifie ses habitudes. On y construit des villas majestueuses, aujourd'hui visibles le long de l'avenue qui porte le nom de la reine Victoria. L'Hôtel Real, un palace de 123 chambres, est érigé sur les hauteurs pour héberger les proches des monarques. Situé entre le vieux centre et la plage El Sardinero, il est entouré d'un jardin luxuriant, avec palmiers et bougainvilliers, qui surplombe la baie et offre une vue imprenable sur les falaises. Aujourd'hui encore, les salons cosy, où flotte l'esprit Belle Époque, conservent cette grandeur passée. C'est la même ambiance, teintée de nostalgie, que l'on peut ressentir au Grand Casino ou encore sur la plage El Sardinero.

Sur ce banc de sable de 8 kilomètres de long, la cabine de bain royale, La Caracola, trône toujours fièrement. Tous les jours, la famille royale y retrouvait ses amis pour prendre les fameux «bains de vagues». Connu pour être un grand sportif, Alfonso XIII a incité la ville de Santander à s'équiper en installations sportives d'avant-garde, qui font aujourd'hui la fierté des autochtones. Dans le port, un yachting-club est construit sur pilotis, un club de tennis et un terrain de polo sont aménagés aux abords du palais. Les écuries du palais, Las Caballerizas Reales, sont ensuite transformées en résidence pour étudiants sous la Seconde République. Elles y accueillent alors des intellectuels prestigieux, comme le philosophe Miguel de Unamuno ou le poète Federico Garcia Lorca. De nos jours, des étudiants du monde entier viennent y suivre des cours.Up

Diane Cambon. Le Figaro